Any ordinary SNCB employee would opt for a return ticket Liège-Paris-Liège by train. Not so for Neal Michiels. He and his pal Bert Puype made the journey by bike.
Quatre jours, 1 200 kilomètres, presque 14 000 mètres de dénivelé. Tel était le défi que nous nous étions lancé, en duo : Bert Puype et moi. Dès le mois de janvier, la préparation a commencé : manger plus de glucides sur le vélo, accumuler les kilomètres, participer au Zigzag des Trappistes (525 km et 5 400 m de D+) comme premier test d’endurance, puis un voyage en bikepacking à travers les cols de la Forêt-Noire et de la Suisse. En août, nous nous sentions prêts pour l’aventure : Liège–Paris–Liège (LPL).
Notre objectif principal était simple : boucler le parcours dans le temps imparti, soit atteindre Liège le dimanche avant 18 h. Pour maximiser nos chances, nous avions planifié les deux premières nuits à l’hôtel afin de garantir un sommeil réparateur : à l’Ibis de Fourmies, déjà après 180 km (avec un détour de 15 km), puis à Meaux, après Paris. Ensuite, nous étions prêts à bivouaquer, sur un simple matelas et dans un sac de couchage ou un bivvy.
Les conditions météo s’annonçaient idéales : vent dans le dos en direction de Paris, temps sec et températures clémentes. Ces circonstances parfaites augmentaient aussi la pression : après des mois de préparation, il n’y aurait plus d’excuse extérieure pour ne pas réussir.
Jour 1 : Liège → Fourmies – une chaîne et un doute
Mercredi 20 août, 18 h. Nous quittons l’auberge de jeunesse Simenon à Liège, parmi une quatre-vingtaine de participants, dont dix duos. Après seulement 55 km sur le RAVeL vers Ciney, ma chaîne casse : le quicklink a lâché. Je transportais la pharmacie, Bert le matériel de réparation. Oubli critique : je n’avais pas prévu de maillon rapide compatible. Heureusement, nous roulions tous deux avec une cassette 12 vitesses ; le sien convenait aussi pour ma chaîne. Dix minutes plus tard, nous repartons, soulagés.
Nous atteignons Fourmies vers 2 h du matin. Bert, cependant, ne se sent pas à 100 %. Nous sommes dans l’incertitude : si la maladie s’installe, l’aventure s’arrête là. La remise en route, le lendemain matin, se fait dans le doute. Mais le vent favorable nous redonne de l’élan, et à Laon, nous faisons la connaissance des « caps » 105, Pierre et Simon, qui deviendront nos principaux rivaux…
Jour 2 : Compiègne, Chantilly et Paris – la contracture
À Compiègne, la tension remonte. Alors que nous venons d’acheter un nouveau quicklink et repartons avec optimisme, une violente contracture me frappe la nuque sur les pavés devant le château. La peur m’envahit : la douleur reste supportable en mouvement, mais qu’en sera-t-il après une nuit d’hôtel ? Ou pire, sur un matelas de bivouac ? Sur le vélo, j’ai du mal à tourner la tête à gauche pour regarder derrière moi. Faute de gros pavés, la traversée majestueuse du domaine de Chantilly perd un peu de sa magie.
L’entrée en région parisienne par les forêts de l’Oise est splendide. Arrivés de nuit à la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, le moral est bon : selfie obligatoire ! Mais nous repartons aussitôt pour respecter le timing. Nous pointons en 8ᵉ position sur les neuf duos encore en course : il faut remonter. À 1 h du matin, nous atteignons l’Ibis Styles de Meaux, comme prévu. Nous y dormons « beaucoup », sachant que les nuits suivantes seraient plus incertaines. Comme à Fourmies, je fais le plein de calories, protéines et glucides au petit-déjeuner.
quatre jours, 1 200 kilomètres et une aventure inoubliable
Jour 3 : Reims et Arlon – le cap du retour
Le parcours nous mène ensuite dans la montagne de Reims, au cœur des vignobles champenois. Nous évoluons désormais dans le peloton central, aux côtés d’Anna et Stefan (cap 101), des Américains Katie et Jason (107), de David et Frederik (109) et de nos amis de Laon. Les trois premiers duos sont déjà loin devant, avec des temps d’arrêt réduits à 20 %.
La fatigue se fait sentir à l’arrivée à Reims, malgré l’adrénaline. Pour ma part, je suis soulagé : la contracture de la nuque n’a pas empiré. Bert fait une sieste pendant que je perds un peu trop de temps à faire des courses pour le bivouac dans un hypermarché. Profitant d’un vent latéral favorable, nous décidons de pousser au-delà d’Orval jusqu’à Arlon pour une troisième nuit à l’hôtel. Cela nous fait rouler 15 km de plus, mais nous assure un vrai repos et la satisfaction d’avoir entamé le parcours final !
Jour 4 : les Fagnes et la 3ᵉ place
Ce dernier tronçon n’est pas redoutable par sa distance (400 km), mais par ses près de 7 000 m de dénivelé. C’est notre terrain de jeu : nous adorons grimper et sommes performants en côte. Après l’abandon de l’un des trois premiers duos, nous voilà en lice pour la 3ᵉ place. Le moral est excellent et devient impeccable à la traversée du splendide Mullerthal. Au Delhaize d’Echternach, une équipe média de l’organisation nous attend : signe que nous sommes dans le bon tempo ?
À mi-parcours du Cotacol Thommerberg à Bracht se trouve la ferme d’un sympathisant de LPL. Nous y arrivons avant le coucher du soleil et optons pour une micro-sieste dans le foin chaud plutôt qu’un vrai sommeil. Les caps 105 et 109 ne sont pas loin devant. Avoir des adversaires aussi forts nous pousse à nous dépasser. Il faut avancer : entamer les 190 derniers kilomètres au matin serait trop risqué pour rester dans les 96 heures.
Le parcours serpente ensuite dans les forêts et les Fagnes. La météo semble toujours clémente, mais vers minuit, un froid humide et perçant nous saisit. Torse, doigts, orteils : tout y passe. À l’arrêt, la sensation s’atténue, mais il faut continuer pour sortir des bois et trouver un abri à Montjoie.
Dans cette ville historique, nous consultons le Dotwatcher pour repérer où les autres se sont arrêtés. Nous sonnons à la porte de l’hôtel où logent les caps 105, mais le gérant refuse de nous accueillir. Nous déployons donc nos matelas dans la chapelle Ave Maria pour y survivre, plus ou moins à l’abri, jusqu’au lever du jour. Transis de froid (3 °C, ressenti bien inférieur), nous nous levons deux heures plus tard, vers 5 h. Un banc dans l’entrée d’un hôtel nous sert de refuge temporaire pour nous réchauffer et grignoter nos dernières provisions.
Au lever du soleil, nous repartons pour les 115 derniers kilomètres, toujours en 3ᵉ position, talonnés par l’équipe 105. Les Hautes Fagnes nous conduisent près des barrages de la Vesdre et de la Gileppe, qui rappellent les inondations de 2021. À Spa commence la finale mythique de Liège–Bastogne–Liège : la côte de Desnié, la descente du Hautregard, La Redoute, Cornemont et La Roche-aux-Faucons. Seule la côte des Forges est absente, les organisateurs ayant privilégié un parcours plus sûr, loin des routes nationales.
Après 90 heures et 16 minutes d’effort, nous franchissons enfin la ligne d’arrivée à l’auberge de jeunesse de Liège. Le comité d’accueil est impressionnant : organisateurs, famille, partenaires, amis. Je crains de m’effondrer avant le repas de fête à 19 h, mais la satisfaction et la fierté l’emportent sur la fatigue.
Bilan et gratitude
Notre objectif de l’année était ambitieux. Même avec une préparation optimale et une excellente condition physique, il fallait encore le « faire » sur le terrain, pour une première. Participer en duo offre un soutien mutuel précieux, mais double aussi les risques de malchance et allonge les arrêts. Un choix audacieux à l’inscription, mais qui s’est révélé le bon : nous avons prouvé la force de notre binôme.
L’aventure ne s’arrête pas à Liège. Si l’esprit rêve déjà à de nouveaux défis, le corps, lui, réclame du repos : une cheville heurtée et un gros orteil engourdi pour Bert ; pour moi, une réactivation de la varicelle sous la forme d’un zona.
Nous tenons à exprimer notre profonde gratitude à l’organisation de Liège–Paris–Liège et à tous les bénévoles pour leur travail remarquable. Un immense merci également à nos nombreux Dotwatchers pour leur soutien constant. Et, pour ma part, un remerciement particulier à la section longues distances des Brussels Big Brackets pour leurs conseils, ainsi qu’à mon magasin Coureur Brussels pour la préparation du vélo.
Neal Michiels.




